Visite de la villa Cavrois, à Croix

Lors d'un week-end à Lille pour voir nos proches, nous avons profité d'un temps libre pour continuer ma découverte de la région. Direction la villa Cavrois, véritable château moderne des années 1930, à une vingtaine de minutes de Lille. 

Visite de la Villa Cavrois : une œuvre totale par Mallet-Stevens

Avant de vous parler de la villa, voici quelques éléments de contexte... Au début du XXᵉ siècle, le nord est l'une des régions les plus industrialisées de France. Roubaix, « ville aux mille cheminées » et Tourcoing sont connues comme centres de production textile. La société Cavrois-Mahieu, fondée en 1865, emploie près de 700 employés qui fabriquent des tissus haut de gamme pour des maisons parisiennes. Les cinq usines travaillent la filature, le tissage et la teinture de la laine et du coton. 

Paul Cavrois, le propriétaire de la société, fait l’acquisition en 1922 d’un terrain à Croix, en périphérie de Roubaix pour y faire construire une maison familiale. La commune de Croix est à l’époque prisée de la bourgeoisie industrielle qui y construit de véritables petits châteaux en style néo-régionaliste. L'intérêt étant de s’éloigner des usines, pour bénéficier d’un environnement sain et d’un meilleur cadre de vie. 

L'histoire de la villa

La commande

Paul Cavrois a une famille nombreuse : il épouse en 1919 Lucie Vanoutryve, veuve de son frère, qui a déjà trois enfants. Ils auront quatre enfants ensemble. Pour son projet de construction, il fait d’abord appel à Jacques Gréber, qui lui propose une maison de style néo-régionaliste très en vogue dans cette période-là. Ce premier projet n'aboutit pas. En 1929, il confie la construction de sa villa à un architecte beaucoup plus novateur, Robert Mallet-Stevens, rencontré à Paris lors de l'exposition des Arts Décoratifs de 1925. Les Cavrois laissent carte blanche à l'architecte qui crée une villa moderne qui tranche radicalement avec le voisinage. La villa Cavrois est inaugurée en 1932, lors du mariage de l’une des filles de la famille. 

Un château moderne

Mallet-Stevens a imaginé la villa Cavrois comme un véritable château moderne. Exemple unique dans le nord de la France de l’architecture moderniste, elle fait 60 mètres de long, dispose de 2 800m² dont 1 840m² habitables et 830m² de terrasse. Ses proportions imposantes s'ajoutent à une distribution en deux ailes symétriques, qui rappellent sans nul doute la tradition des résidences aristocratiques du XVIIe siècle. La modernité se traduit par des espaces aux volumes dépouillés, l'absence d'ornements, la multiplication des toits terrasses, l'équipement de pointe (chauffage central, téléphonie, heure électrique, ascenseur…) et le recours à des matériaux et à des techniques industrielles. 

L’architecte conçoit la villa dans son ensemble, dessinant le décor intérieur et le mobilier, mais aussi les jardins et espaces extérieurs. Le tout est pensé comme une œuvre totale. 

La villa abandonnée et sa restauration

Durant la Seconde Guerre mondiale, la villa est occupée par l'armée allemande et subit des dommages. Ils comblent notamment le miroir d'eau, trop visible du ciel. À son retour, la famille fait modifier la distribution intérieure de la villa pour créer deux appartements indépendants pour les fils de la famille. La villa est habitée jusqu’en 1986, décès de Madame Cavrois, puis vendue à un promoteur immobilier qui souhaite lotir le parc. 

Abandonnée, la villa est alors en proie au vandalisme et se dégrade rapidement, malgré son classement au titre des monuments historiques en 1990. Grâce à la mobilisation d'une association de sauvegarde, l'État acquiert la villa et la partie centrale du parc en 2001 et en confie la gestion au Centre des monuments nationaux en 2008. 

Il a fallu treize ans de restauration pour redonner à la villa et au parc leur éclat de 1932. Un chantier qui a nécessité des recherches historiques et archéologiques pointues, des savoir-faire spécifiques et une politique d’acquisition active des meubles d’origine. En effet, il a fallu retrouver le mobilier vendu aux enchères en 1987, pour ainsi restituer les biens dans les espaces pour lesquels ils ont été conçus. La villa en compte actuellement plus de 300. 

Notre visite

Le rez-de-chaussée

La visite débute par le rez-de-chaussée. On y découvre les pièces fonctionnelles et de réception de la maison : le vestibule, la cuisine, les salles à manger des parents et des enfants puis le hall-salon ouvert sur l'extérieur et le bureau. On arrive ensuite aux chambres indépendantes avec salle de bain privative des garçons. 

Le premier et le deuxième étage

On emprunte ensuite le grand escalier avec sa baie vitrée en demi-cercle dominant le jardin sud. On découvre d'abord l'aile des parents avec leur grande salle de bain, la chambre et le boudoir. La salle de bain est un beau témoin de la modernité de la maison, avec sa zone d'habillement avec rangements intégrés, ses beaux volumes ou encore ses formes étonnantes comme la douche circulaire. La seconde partie de l'étage est composée des chambres et des salles de bain des filles et de la gouvernante. L'une des chambres n'a pas restaurée, pour montrer les ravages subis par la villa. Enfin, au dernier étage, on découvre la grande salle de jeu avec scène et les salles d'études des enfants, donnant sur un toit-terrasse offrant une vue à 360° sur le jardin.  

Le sous-sol

On accède enfin au sous-sol, comprenant la buanderie avec sèche-linge, la chaufferie mais aussi une cave à vin servant aujourd'hui de matériauthèque, où l'on découvre les différents matériaux utilisés dans la construction. Un film sur la restauration de la villa est projeté dans le garage. 

Le jardin

En sortant, on ne peut pas manquer le sublime bassin de natation de 27m de long parallèle à la villa. À l’époque, c'était un signe de modernité et la natation, tout comme la gymnastique, était un sport extrêmement valorisé. Place ensuite au parc, hérité des jardins réguliers du XVIIᵉ siècle. Il s’étendait à l’origine sur 5 hectares - il n’en reste que moins de la moitié aujourd’hui, le reste ayant servi à la construction d’un lotissement dans les années 1990. Il a été pensé comme un prolongement de la villa de par ses lignes et ses dimensions. Au nord, le parc était aménagé pour que les automobiles circulent facilement. Au sud, le miroir d’eau de 72 mètres de long prolonge le grand hall et l’allée circulaire et vient refléter et sublimer la façade sud. À l’est, on trouvait une roseraie, un verger, un potager et un poulailler utilisés pour les besoins de la villa. Ils ont aujourd’hui complètement disparu. 

Quelques photos supplémentaires...

Mon avis 

J'ai trouvé la visite très intéressante ! On remonte le temps vers les années 1930 dès l'entrée, avec pourtant une étonnante impression de modernité. J'ai été impressionnée par les volumes et j'ai apprécié les pièces de mobilier uniques et originales, mais aussi tous les petits détails. Par exemple, les robinets de la cuisine distribuaient de l'eau chaude et froide, mais aussi adoucie pour préserver la vaisselle du calcaire. Nous avions à disposition un dépliant assez complet qui présentait l'histoire de la villa et chaque pièce. Le film à la fin de la visite fait prendre conscience de l'important travail de restauration réalisé. Il faut compter environ 1h de visite. 

Infos pratiques

🏰 La Villa Cavrois est située au 60 avenue John Fitzgerald Kennedy 59170 Croix. Le stationnement est possible aux abords de la Villa, directement dans la rue. Elle est également accessible en transports en commun, à 15min à pied de l'arrêt "Villa Cavrois" sur le Tramway R, et à 25min à pied de l'arrêt "Croix Centre" sur la ligne 2 du Métro.

🏰 Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h. Dernière entrée 45min avant la fermeture.

🏰 Tarif individuel à 11€ / Billet jumelé avec le Musée La Piscine de Roubaix à 19.50€ ou avec la Manuf à 12.50€ / Gratuit pour les moins de 25 ans et pour tous le premier dimanche des mois de janvier, février, mars, novembre et décembre. Pour en savoir plus sur les tarifs, les réductions et les tarifs spéciaux, rendez-vous sur le site. 

Connaissiez-vous la Villa Cavrois ? Est-ce une visite qui pourrait vous plaire ?